« Eh bien visiblement ça s’est bien passé, chef, ce gemba ! Tout va bien dans cette équipe sans aucun doute, ils n’ont pas de problème »
-Ah oui ? Et à quoi est-ce que vous le voyez ?
-Mais votre sourire, chef ! Vous avez l’air toute contente de votre visite.
-Bien sûr que je suis souriante. C’est la pratique de base dans un gemba, un des facteurs importants de succès. Mais pas du tout un critère de réussite.
Si je m’autorisais à sortir de mes gonds à la première contrariété, au premier problème que l’on m’expose, petit ou systémique, mes collaborateurs ne me montreraient plus que ce qu’ils penseraient que je voudrais voir : un beau tapis bien lisse pour masquer la poussière. Le problème et sa révélation sont les bienvenus dans le lean.
Je souris parce que j’ai découvert à l’occasion de ce gemba quelque chose que j’ignorais complètement. Qui impacte douloureusement nos clients. Et qui nous coûte des sommes folles.
Je souris parce que cette équipe s’en est rendue compte, toute seule. Qu’elle en a quantifié et chiffré les impacts. Qu’elle me les a montrés. Et parce qu’elle a décidé de s’y attaquer sérieusement en ouvrant une résolution de problème formalisée.
Comme vous le voyez, cela n’a rien à voir avec l’absence de problème, mais bien au contraire c’est la compréhension des problèmes, la capacité de l’équipe à en parler -en particulier avec une dirigeante comme moi – et à les traiter qui m’intéresse. Les entreprises qui arriveront à s’adapter au rythme de changement du monde actuel sont celles qui perdureront.
A contrario c’est l’absence de problème visible qui me parait très inquiétante. Un gemba est réussi lorsque :
1-Il a donné lieu à un véritable échange, équilibré. Mesure factuelle : le visiteur a beaucoup MOINS parlé que le moins bavard de ses collaborateurs. C’est le plus dur. Tips : demandez juste : pourquoi cela ? Comment cela se fait-il ?
2-Le visiteur a découvert, appris ou compris au moins une chose qu’il (elle) ignorait, ou bien qui se trouve être en contradiction avec ce qu’elle pensait être vrai et qui s’avère erroné. Mesure factuelle : cette découverte a donné lieu à une reformulation orale “incroyable ! J’ai découvert qu’on avait ouvert des flux pour un “client” avec lequel nous n’avons aucune relation contractuelle, ni commerciale. Et en urgence en plus !”
“Mais alors cet irritant-là que vous venez de me montrer, il se répète tous les jours ? Sur chaque dossier traité ? C’est très intéressant, merci beaucoup ! »
3- L’équipe visitée a pu exprimer clairement un sujet majeur pour elle qu’elle a sur le cœur : « on nous a déplacé l’imprimante dans le couloir de l’autre côté de l’open space, soi-disant pour notre bien. Au total, nous passons notre vie à nous lever, à marcher dans les couloirs, à attendre que notre impression à nous sorte, ou à la rechercher parmi toutes celles de nos collègues qui sont déjà sorties. Pendant ce temps-là mes dossiers n’avancent pas »
4-Chacun repart avec au moins une action précise d’amélioration qu’il a lui-même décidé et qu’il n’aurait pas lancée de suite sans ce gemba. Mesure factuelle la reformulation : « je vais travailler sur cela dès cet après-midi, demain matin, ce soir… »
5-Les deux parties ont envie de réitérer l’expérience. Mesure factuelle : le visiteur a demandé à voir un exemple, qui lui a été effectivement montré et commenté, et qui a servi de base à la discussion.
Enfin, le gemba porte sur cinq natures de terrains, qui offrent autant de points de vue différents sur le client, l’équipe, le pilotage ou le processus. A voir dans un prochain article…
Contactez-nous si vous aussi vous souhaitez aller voir sur le terrain autre chose qu’un tapis bien lisse. Les coachs d’Operae accompagnent des dirigeants et managers sur le terrain depuis plus de quinze ans.
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2 réflexions sur “Gemba : bien distinguer les critères de réussite des facteurs de succès d’une visite terrain”