Personne n’aime changer sa manière de faire, sa façon de travailler ou sa routine, surtout quand elles sont confortablement installées depuis longtemps. C’est l’un de nos nombreux biais cognitifs : le biais du statu quo (pour vous remémorer les biais cognitifs, 116 sont listés ici).
Certains consultants appellent cela la résistance au changement. Un obstacle perçu comme inévitable, incontournable, qui repousse comme la tête de l’Hydre. Un obstacle à la bonne réalisation de leur travail de « conduite du changement », qui consisterait à faire changer les gens, au besoin en leur infligeant leur aide. Un obstacle à combattre, à contourner, à forcer. Un obstacle qui s’exprime à travers quelques phrases irritantes, toujours les mêmes plaintes : « on a déjà essayé ça ne marche pas » ; « de toute manière cela ne sert à rien » ; « je suis d’accord mais je ne vois pas du tout où tu veux en venir » ; « c’est plus rapide à ma manière » ; « moi j’ai un vrai boulot, tes trucs c’est chronophage ».
Là on est mal partis pour le changement. Mal partis pour faire appliquer nos solutions. Mal partis pour l’engagement des personnes. Mal partis pour améliorer quoi que ce soit.
Et c’est normal, on s’y prend en dépit du bon sens. De la mauvaise manière. En cherchant à imposer nos jolis slides, notre pensée, notre manière de faire. A « déployer » notre solution toute faite à répliquer partout. En refusant de prendre en compte les remarques précédentes, en refusant leur réalité, en refusant de s’y intéresser. En cherchant à faire appliquer le plus vite possible notre manière de faire. C’est notre biais cognitif à nous : le Biais d’attention, qui désigne la manière dont certaines informations sont traitées différemment par le cerveau (filtrées) en fonction de nos préoccupations et de nos centres d’intérêt (à relire ici).
Ce n’est pas une fatalité. Le coach lean, lui, dispose d’une approche validée pour faire différemment : les dix règles du kaizen bien connues.
- Challenger le statu quo. Remettre en question les pratiques actuelles.
- Penser à comment faire plutôt qu’expliquer pourquoi on ne peut pas faire.
- Ne pas s’excuser, ne pas blâmer, ne pas critiquer. Aller voir comment le processus fonctionne.
- Ne pas viser la perfection du premier coup. Chercher 5 % d’amélioration maintenant.
- Chercher à faire bien avant de faire vite.
- Trouver des solutions à investissement 0.
- Continuer à trouver des idées dans la difficulté.
- Poser 5 fois la question « Pourquoi ? » et rechercher la cause première.
- Rechercher les idées de 10 personnes plutôt que le savoir d’une seule.
- Les opportunités d’amélioration sont infinies.
Mais connaitre ces règles n’indique pas pour autant comment s’en servir. Voici quelques exemples de questionnement utile pour approfondir les causes de certaines réactions. Avec ces questions, l’interlocuteur fait un pas de coté, qui lui permet de réfléchir au bénéfice de tenter une approche différente.
- « On a toujours fait comme cela »
Et cela marche bien ? Tous vos clients sont contents ? Qu’en disent vos collègues du SAV ? Les conditions de travail sont parfaitement sécures et satisfaisantes ? Combien de jours d’affilée sans accident ? L’entreprise gagne-t-elle de l’argent sur cette activité ? Qu’en pense ton management / ta direction ? Et toi, qu’en penses-tu vraiment ?
permettrait de Challenger le statu quo ou remettre en question les pratiques actuelles. - « Non mais je t’explique ils ne voudront jamais »
Qui ne voudrait pas exactement ? Pourquoi ? Connaitrais-tu quelqu’un qui serait d’accord pour mener une expérience localisée ? Lui avons-nous déjà demandé ? Est-ce que l’on t’a déjà dit non ? Lui avons-nous expliqué l’intérêt pour lui ? Où pourrait-on essayer à ton avis ?
permettrait de Penser à comment faire plutôt qu’expliquer pourquoi on ne peut pas faire - « Ils n’en ont rien à faire de nos demandes, on est la dernière roue du carrosse ».
De quelles demandes parle-t-on ? Combien y en a-t-il en attente ? De qui s’agit-il ? Quelles ont été les conséquences pour nous, pour nos clients internes, pour le client final, pour l’entreprise ? En ont-ils été informés ? Leur a-t-on fourni l’ensemble des environnements et des informations nécessaires ? Serait-il possible de regarder ensemble des exemples ? Montre-moi ? permettrait de Ne pas s’excuser, ne pas blâmer, ne pas critiquer. Aller voir comment le processus fonctionne. - « De toutes manières le nouveau projet TERMINATOR va tout automatiser. Il résoudra tous nos problèmes »
Dans combien de temps devrait-il aboutir ? A-t-il déjà démarré ? En attendant, quelles sont les conséquences de laisser perdurer la situation, pour les clients utilisateurs, pour les collaborateurs, pour toi, pour l’entreprise ? Cela arrive souvent ? Combien de fois par jour / semaine ?
permettrait de Ne pas viser la perfection du premier coup, mais de chercher 5% d’amélioration maintenant - « Tant pis pour [la sécurité], [le refactoring], [la documentation],[ les tests], [… ]on s’en passera si on veut respecter nos délais »
Quelles sont les conséquences probables ? Les conséquences certaines ? Qui va payer pour former / réparer / corriger ? Imaginons un instant que notre SI / notre production soit totalement immobilisé durant une à deux semaines, quelles en seraient les conséquences ? Et en termes financiers ? Qui est-ce qui ira annoncer la mauvaise nouvelle ? Tu connais un bon avocat pénaliste ? permettrait de Chercher à faire bien avant de faire vite - « Il faut plus de monde »
Plus de monde à subir encore plus d’irritants ? Plus de monde à attendre que la machine vous rende la main ? Plus de monde à corriger encore plus de défauts ? Plus de monde aussi mal formé qu’actuellement, qui générerait encore plus d’anomalies ? Plus de monde ou bien plus d’efficacité ? Que faudrait-il modifier dans la manière de faire actuelle pour que les choses se passent mieux de votre point de vue ? permettrait de Trouver des solutions à investissement 0. - « Là on n’a plus le temps de faire du lean il faut retourner aux basiques »
Concrètement de quels basiques parles-tu ? Qu’est ce qui te permet de penser que la même situation ne va pas se reproduire demain ? Comment protéger notre client, nos collaborateurs, notre marge, les trois, toi-même ? permettrait de Continuer à trouver des idées dans la difficulté - « Encore un gars qui n’a pas respecté le processus ! »
Pourquoi : le connaissait-il ? Y avait-il été formé ? De la bonne manière ? Etait-il capable d’expliquer pourquoi c’était important ? Le processus était-il applicable dans le contexte précis ? Etait-il suffisamment détaillé, sans ambiguïté ni interprétation possible ? Montre-moi le standard ? Que ce serait-il passé s’il avait effectivement respecté strictement le processus tel que rédigé ? Vous croyez vraiment qu’il suffirait de se séparer de ce collaborateur pour résoudre définitivement le problème ? Et si c’est un intérimaire ?
permettrait de Poser 5 fois la question « Pourquoi ? » et rechercher la cause première. - « Je vais leur expliquer, moi, comment ils devraient s’y prendre ! «
Leur avez-vous expliqué les conséquences pour vous de ces manquements, pour nos clients communs, pour notre entreprise ? Sont-ils réguliers ? Quelle est la fréquence de ces défauts sur ce qui vous est livré ? Comment en sont-ils informés ? Savent-ils à quoi vous vous attendez en termes de qualité ? Vous êtes-vous mis d’accord avec eux sur la définition du bon niveau de qualité de ce qu’ils vous livrent ? Vous ont-ils expliqué les raisons pour lesquelles cela est arrivé ? En quoi pourriez-vous les aider à agir différemment ?
permettrait de Rechercher les idées de 10 personnes plutôt que le savoir d’une seule. - « On fera du lean quand on aura d’abord résolu tous nos problèmes »
Qu’est-ce qui ferait que vous auriez passé une bonne semaine, une bonne année ? Un exemple d’irritant actuellement ? Qu’est-ce que vous voudriez vraiment améliorer, et qui est important pour vous ? De quels problèmes s’agit-il ?
Les opportunités d’amélioration sont infinies.
Conduire un changement lean, c’est d’abord écouter, puis regarder. Ensuite poser quelques questions. De bonnes questions. Ouvertes. Faire confiance à votre interlocuteur. Et ensuite inviter à expérimenter.
Avec le regard toujours posé sur le client, sur la qualité, sur le rythme, et sur la qualité de vie au travail.
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