Ce que signifie la transformation digitale, 2e partie

operae partners transformation digitaleDans le premier volet de cette série, nous nous sommes attardés sur une définition de la transformation digitale en proposant d’en circonscrire l’enjeu principal :

Exploiter la radicalité des capacités d’internet (temps-réel, ubiquité, multitude) pour construire et ajuster en permanence :

  1. une connaissance validée de la réalité du marché, aujourd’hui, afin d’élaborer les produits et services les plus adaptés pour y répondre
  2. une connaissance validée de la réalité de l’organisation et des processus pour livrer le plus rapidement possible ces produits et services

Dans ce second billet nous allons décrire les quatre premiers des 7 points cardinaux de cette transformation. Pour chacun, nous allons proposer des principes, des exemples, des anti-patterns et des questions vous permettant d’évaluer votre stratégie. Ces sept points sont les suivants :

  1. la relation client
  2. les produits et services
  3. les processus
  4. les outils

 

1. Le client : au cœur de l’entreprise

Principes

La transformation digitale c’est avant tout une profonde transformation de la relation client ou plutôt, si on le voit depuis l’autre perspective, une expérience utilisateur complètement intégrée. Les rapidité et fluidité du numérique ramènent, si je peux me permettre la métaphore, l’église du client au centre de l’entreprise globalisée : les impairs avec ce dernier ne sont tout simplement plus possibles. Tous les éléments de l’organisation, les 6 points cardinaux que nous allons évoquer ensuite, doivent être regardés depuis la perspective du client.

Cette relation est devenue temps-réel grâce à l’utilisation des réseaux sociaux. Elle est aussi devenue transparente et personnalisée. Le client a acquis ce que les anglo-saxons appellent une digital literacy, une culture digitale des outils mais aussi des pratiques. Il s’attend à établir une conversation avec les entreprises, entreprises qui lui parlent comme à une vraie personne et plus comme à un segment de marché : franchise et authenticité plutôt que BS marketing et échanges procéduraux.

Le client s’attend aussi à être intégré dans des processus de conception de produits ou de services, comme chez Michelin (cas d’étude présenté lors de la dernière conférence Enterprise 2.0 Summit à Paris). Il lui semble naturel que les entreprises soient à l’écoute et disponibles.

Pour résumer, et à l’image d’Amazon, l’entreprise digitale n’a d’autre alternative que d’être “obsessionnelle” à propos de son client.

Radicalité en action

Chaque personne rejoignant Automattic (la structure derrière le CMS/plateforme de blog WordPress, dans le TOP 10 des sites les plus visités au monde) commence toujours par passer un mois au sein de l’activité de support utilisateur, quelque soit le poste. Voir le témoignage de Scott Berkun dans le formidable Year Without Pants.

Autre exemple reporté par l’article très complet sur Amazon de 15marches :

Un jour, Jeff Bezos interrogea en pleine réunion exécutive le responsable du call center sur le temps moyen d’attente des clients au téléphone. Le responsable lui répondit bravement « moins d’une minute ». Bezos prit alors son téléphone et appela le Amazon-800 devant ses 30 collaborateurs. Dans un silence de plomb, la musique s’écoula par le haut-parleur pendant 4 minutes et 30 secondes. L’opérateur qui décrocha enfin entendit son PDG dire « c’était juste pour vérifier » puis raccrocher. Le responsable quitta la société quelques mois après.

Anti-pattern

Absence d’échanges avec vos clients sur les réseaux sociaux et peu d’importance accordée à ce que l’on y dit de votre marque. Sous-traitance des interfaces avec les clients (support, help-desk etc …). Absence de suivi de la satisfaction client. Organisation du travail autour de l’optimisation des ressources plutôt qu’autour de l’optimisation de l’expérience client.

Benchmark

Quelles sont les dernières réclamations remontées par vos clients ? Quel est leur niveau de satisfaction ? Toutes les interfaces directes avec le client sont-elles prises en charges par vos employés ou sont-elles sous-traitées ? Quel est le niveau de satisfaction de vos clients avec ces équipes ? Quels sont les axes d’amélioration?

Si vous ne savez pas répondre à ces questions sans avoir à vous plonger dans des océans de reporting, alors le client n’est pas au cœur de vos préoccupations : dans le cadre de la transformation numérique, vous n’êtes pas sur les bons sujets.

2. Produits ou services : en constante mutation

Principe

Ils ont un cycle de vie, et donc de conception et de mise sur le marché, beaucoup, beaucoup plus courts. Pas étonnant que l’approche Lean Startup jouit de tant de succès. On procède de façon itérative en développant un incrément minimal pour en tester la valeur.

Fini les plans quinquennaux : on profite de la radicalité d’internet (la masse de clientèle potentielle, les tests en temps réels) pour tester très rapidement une hypothèse et pour ajuster rapidement (le principe Lean Startup de Pivot) : c’est ainsi que l’on construit notre apprentissage validé.

Le motto du Lean Start-up : Build, Measure, Learn. Un PDCA sans “Plan” pour se forcer à aller chercher le retour du client au plus tôt et éradiquer le risque de l’Analysis Paralysis.

Radicalité en action

Lorsque Basecamp (solution SaaS de pilotage de projet) a été livré en production, le système de facturation et de paiement ne fonctionnait pas encore. Mais comme l’entreprise n’allait facturer qu’à la fin du mois, il leur restait du temps pour le concevoir et le réaliser. L’agilité du juste-à-temps dans toute son efficacité et son élégance.

Anti-pattern

La fameuse Roadmap sur trois ans. Des produits livrés après 18 ou 24 mois de développement laborieux d’effet tunnel sans aller chercher le retour de l’utilisateur. Peu d’approche expérimentale et de tests (voir le point #6). L’Analysis Paralysis durant lesquelles on fait études sur études pour déterminer la bonne solution.

Benchmark

Combien de temps vous faut-il pour tester une nouvelle idée ? La constante de temps est-elle de l’ordre de la semaine, du mois, du trimestre, de l’année ? Par combien de personnes doit-être validée une initiative avant d’être testée ? Comment réintégrez vous les retours utilisateurs dans l’évolution de ce produit / service ?

3. Processus : rapides et centrés sur le client

Principes

cf point # 1 : les processus sont conçus du client (qui représente une obsession) au client (qui est celui qui paye l’entreprise). Ils se concentrent sur les deux éléments structurants de la satisfaction client : la qualité (i.e l’adéquation entre ce qui est livré et ce qui est attendu par le client) et la rapidité. Leur performance est mesurée en fonction d’indicateurs qui ont un sens pour le client, pas nécessairement pour l’organisation.

Et à ce jour, le meilleur modèle de processus répondant à ces deux injonctions est le flux tiré. Cela a permis de retirer les gaspillages : attentes (ex : validation par 5 managers différents), problèmes de qualité, étapes inutiles, diagrammes de Gannt,  … On s’appuie sur l’expertise des équipes pour les améliorer en permanence : ils sont donc adaptables et ne sont pas figés dans un progiciel d’entreprise. Voir point #7.

Les célèbres Feature Teams de l’agilité et du géant du web ne sont rien d’autre que le mise en œuvre du flux tiré : des équipes pluri-disciplinaires et autonomes, disposant de toutes les compétences pour avancer sur un sujet (conception, UX, développement, tests, déploiement en production), ce qui éradique les dépendances externes (et donc les attentes), qui procèdent par petit lot, qui gèrent leur intégration (plus besoin de chef de projet) grâce au processus du flux permettant à chaque étape d’optimiser la valeur créée et de réduire les gaspillages.

Radicalité en action

La durée d’un cycle de développement d’application logicielle chez Zappos.com est une semaine. Celui de livraisons des versions de Chrome est de 6 semaines pour un produit utilisé par plus de 750 Millions d’utilisateurs. Amazon livre du nouveau logiciel en production toutes les 11,6 secondes.

Lorsque cette DSI standard vous fait attendre 3 mois pour vous donner un environnement de développement ou de recette pour votre projet, Google Compute Engine vous l’offre en 3 minutes.

Anti-Pattern

Bon nombre d’entreprises que j’ai visitées affirment avoir le client au cœur de leurs processus. Pourtant lorsqu’on y regarde de plus près, on se rend compte que l’objectif de ces processus est bien plus d’optimiser l’utilisation des ressources de l’entreprise que d’optimiser l’expérience utilisateur. Et les lead times sont de l’ordre du mois.

Benchmark

Vos processus sont-ils conçus du client au client ? Quel en est le lead-time ? Quels sont les indicateurs utilisés pour en juger la performance ? Ces indicateurs ont-ils un sens depuis la perspective du client ? Quel est votre taux de non-qualité ? Qui est en charge d’améliorer, en permanence, ce processus de bout en bout ? Quel est le lead-time nécessaire pour proposer au client un changement minimal ? Quel est le ratio-création de valeur / lead-time de vos processus ? Quel est le niveau d’amélioration sur les 3 / 6 / 12 derniers mois ?

4. Outils : fluides et intuitifs

Principes

Nous parlons là d’outils légers et fluides incarnés par trois tendances lourdes : mobile, social et cloud. Des outils qui utilisent à plein les capacités d’internet : le lien hypertexte, les profils utilisateurs, les fils d’actualité (timeline), les communautés, la fluidité et l’usabilité. L’intérêt de la fluidité n’est pas de faire sympa ou cosmétique mais de faciliter l’adoption des outils. Si les dix dernières années semblent avoir été spectaculaires en termes d’innovation c’est parce que ces innovations ont été massivement adoptées. Il s’agit d’un levier essentiel pour profiter de la multitude.

Radicalité en action

Au début des années 2010, Facebook avait une croissance de 200 Millions d’utilisateurs par an.

Anti-pattern

On ne parle pas ici d’outils qui reproduisent sur internet des visions client-lourd ou (encore plus lourd) client-serveur, ces logiciels d’entreprise patauds et empruntés qui utilisent internet pour mettre un excel dans votre navigateur.

Il est particulièrement amusant de constater aujourd’hui que les mêmes éditeurs qui ont transformé nos DSI en forteresses bureaucratiques, donnant une image terrible de l’informatique, tout en se présentant comme des “business partners” (yeux au ciel), ces mêmes éditeurs, donc, se présentent comme les partenaires rêvés pour la mise en œuvre de la transformation digitale. Je recommande la plus grande vigilance dans le choix des outils et vos partenaires technologique pour cette transformation avec un benchmark facile : les GAFAs choisiraient-ils cette solution ? Avez-vous vraiment envie de reproduire avec votre transformation digitale les écueils  de l’informatisation de vos processus ?

Benchmark

Quel est le temps de réponse des outils que vous mettez à disposition de vos équipe ? Supérieur à 1 seconde, à 2 secondes, à 3 secondes ? Est-il acceptable pour vos employés ? Ces outils sont-ils fiables ? En combien de temps réalisent-ils leurs tâches quotidiennes ? Combien de problèmes ont-ils rencontré cette dernière semaine dans l’utilisation de ces outils ? En combien de temps les problèmes remontés sont-ils résolus ? Quel est le niveau de satisfaction des utilisateurs ?

Quelle est votre stratégie d’achat d’outils : est-elle guidée par la performance de leur utilisation par leurs clients (i.e. les utilisateurs) ou par des critères organisationnels (i.e la gouvernance du SI) ? Quel est leur taux de disponibilité ? Quel est le coût d’une indisponibilité ?

Dans la troisième partie, nous évoquerons les 3 derniers points cardinaux. A suivre….

Une réflexion sur “Ce que signifie la transformation digitale, 2e partie

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