Vendredi 12 octobre se tenait le 30e séminaire Lean en France à Télécom Paris Tech. A cette occasion, Alejandro Garcia-Mella, directeur Achat et Supply Chain chez Aramisauto nous a montré ce qu’il a appris en mettant en place le flux tiré dans ses agences.
La mission d’Aramisauto : « rendre simple et accessible la vente et l’achat automobile ». D’après Alejandro, acheter un véhicule est le deuxième poste de dépense des ménages et est souvent vécu comme une expérience stressante. C’est beaucoup d’argent et il ne faut pas se tromper. Il faut un process simple pour le client, un seul interlocuteur, sans être obligé de se déplacer pour comparer et se battre avec les vendeurs pour faire une bonne affaire. Aramisauto cherche à ce que l’expérience d’achat depuis chez soi soit, limite meilleure qu’en showroom.
Pour servir leur ambition « devenir la solution réflexe pour l’achat et la vente de voitures sur internet en Europe », ils se sont aperçus qu’une des difficultés était d’arriver à respecter les rendez-vous de livraison avec les clients.
En tant que client, début 2016, j’ai pu apprécier la facilité d’achat : je savais exactement quelle voiture je voulais et en quelques clics j’ai trouvé le bon modèle, à un prix très compétitif comparé à mon concessionnaire. En revanche, j’ai dû attendre 42 jours avant de récupérer le véhicule en point de vente, pour un mois annoncé.
Alejandro nous précise que les parkings des agences étaient saturés, qu’ils n’étaient pas capables de prévoir le volume de livraison de la semaine en cours et qu’ils ne comprenaient pas pourquoi ; chaque service rejetant la faute sur d’autres :
Pour le responsable d’agence : « les véhicules arrivent avec trop de retard ».
Pour la logistique : « les agences ne prennent pas assez de rdv » d’où les parkings saturés.
Pour les directeurs régionaux : « nous n’avons pas assez de voitures pour livrer en agence ».
Tester le flux tiré pour voir où sont les problèmes
Pour voir où sont les problèmes, Aramisauto a alors décidé de tester le flux tiré sur quelques agences. Une des premières choses mise en place fut l’organisation des parkings avec des zones claires :
- Les véhicules prêts à être livrés ;
- Les véhicules vendus en attente de préparation ;
- Le stock commercial ;
- Les véhicules repris en attente d’enlèvement ;
- Les véhicules en anomalie (le bac rouge).
Ensuite, c’est seulement la demande du client qui déclenche le transport vers l’agence de référence, c’est-à-dire que les chargés de livraison « tirent » les voitures en posant le rdv de livraison avec le client. La logistique s’organise pour livrer un à deux jours avant le rdv, afin de mieux voir les problèmes et identifier les causes. En se mettant sous contrainte, les équipes voient les problèmes et se mettent ainsi dans une dynamique de résolution et d’apprentissage.
La mise en place de ce flux tiré leur a permis de comprendre que :
- 25 % des véhicules n’étaient pas livrables en raison d’une indisponibilité d’immatriculation.
- 20 % des véhicules neufs arrivaient avec plus de 15 jours d’avance.
- Les équipes ne maîtrisaient pas la partie administrative pour valider les dossiers de financement : on s’y prenait souvent trop tard.
- La logistique poussait des véhicules dans les agences pour optimiser le remplissage des camions.
De 46 % à 70 % de clients livrés à l’heure et un temps d’attente divisé par 2 : les résultats spectaculaires du flux tiré
En termes de résultats, Aramisauto s’est rendu compte que sa surface de parking pouvait être plus petite, malgré une croissance de +20 % ; ce qui lui a permis d’ouvrir de nouvelles agences dans des lieux où ils n’imaginaient pas pouvoir s’installer.
Après un peu moins d’une année de déploiement progressif du flux tiré dans chaque agence à la place du flux poussé, Aramis est passé de 46 % à 70 % de clients livrés à l’heure et ils ont un objectif à terme d’atteindre les 95 %. Plus le temps passe plus il y a d’écart entre le flux tiré et le flux poussé, et cela est bien le résultat de toutes les résolutions de problèmes faites sur le sujet depuis le début.
Le délai d’attente pour le client est divisé par 2 et la satisfaction client s’est fortement amélioré comme indique le Net Promoter Score qui est passée de 33 à 60 pts.
L’entreprise a réussi à réduire ses stocks tout en supportant une augmentation importante de 25 % de son volume de livraison ; soit environ 10M€ de stock immobilisé en moins pour assurer l’activité.
Le flux tiré pour Aramisauto a permis d’améliorer les conditions de travail des équipes, de visualiser les problèmes et les a obligés à les creuser, d’améliorer la satisfaction client, et de développer le team work entre les services.
Pour finir : « C’est étonnant à quel point il faut changer d’avis une fois que l’on est devant le problème. C’est implacable ! ». Tel est l’apprentissage qu’Alejandro souligne comme étant le plus important de son expérience. Il précise aussi que Aramisauto a vraiment commencé à changer quand le directeur général l’a fait : « maintenant il est en train de nous changer tous. »
« Aramisauto a eu des bénéfices par ricochet : moins d’appels clients, la logistique moins interpellée par le retour client : on n’a pas directement travaillé sur la productivité, mais elle est là comme résultat du travail réalisé sur le service au client ! Et ça c’est un sacré résultat aussi. »
« Le flux tiré a comme objectif l’amélioration du lead time client, et cela tombe bien puisque c’était ce que nos clients nous reprochaient : le retard de livraison. » C’est aussi un outil d’apprentissage, toutes les résolutions de problèmes apportent des résultats bénéfiques sur les performances, sur la QVT et surtout sur le service client.
Ce projet Aramisauto met en évidence que le flux tiré porte ses fruits aussi bien dans l’industrie (dans cette histoire : la partie logistique) que dans les services (les agences).
Franck Dufrenoy et Christophe Mouton
Un petit follow-up sur ce sujet. Le problem-solving nous a amené à lancer cette proposition innovante dans le secteur:
https://pro.largus.fr/actualites/aramisauto-lance-la-livraison-de-voitures-doccasion-en-24-h-10612394.html
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