Visite chez Toyota à Nagoya : impact de l’andon sur le juste-à-temps

Photo by Branden Tate on Unsplash

Lors de notre visite sur le site de l’usine Toyota Tsutsumi à Nagoya nous avons assisté au déclenchement puis au traitement d’un andon (signalement visuel et/ou auditif d’un incident) avec arrêt total de l’usine. Quel impact a eu cet incident de production sur le « juste-à-temps » de l’usine ?

Le juste-à-temps (just-in-time), 2e pilier de la maison Toyota, est défini ainsi : livrer uniquement ce dont on a besoin, quand on en a besoin et uniquement en quantité demandée. (Make only what is needed, when it is needed and in the amount needed). Pour réaliser cela sans stockage et dans des coûts raisonnables, le TPS (Toyota Production System) a établi qu’il faut savoir organiser une logistique entièrement alignée sur les besoins de la chaîne de production (donc elle aussi en Juste-à-temps), avoir une variabilité réduite sur l’ensemble du processus de fabrication pour assurer la répétabilité des étapes, donc de leur délai, fonctionner en flux idéalement mixé tiré lissé. Il est à noter que le Juste-à-temps est tout à fait réalisable dans des conditions difficiles avec de nombreux gaspillages restant à réduire, au prix d’étapes de processus plus longues, plus de planification amont et des surcoûts conséquents.

Ceci étant dit, on imagine donc aisément qu’un incident de production va avoir un impact important sur le Juste-à-temps des produits. Ce serait effectivement le cas dans beaucoup d’entreprises. Pas chez Toyota.

L’arrêt au premier défaut, responsable de l’andon arrêtant entièrement l’usine est une situation usuelle car faisant partie intégrante d’une approche assumée de qualité totale. Il est à noter que dans ce cas c’est une machine qui a sonné l’alarme mais le signal peut être déclenché de la même manière par un opérateur, symbole d’une intégration homme-machine réussie et fluide. Il est de plus remarquable de voir la cohésion sur le lieu de production (gemba) entre opérateurs, experts machines et ingénieurs pour que l’incident soit résolu le plus rapidement possible de manière définitive et que tous approfondissent ensemble leurs connaissances métiers.

De fait, l’ensemble des employés s’est immédiatement ré-investi dans des activités de 5S (rangement et nettoyage) et de kaizen (amélioration des standards, résolution de problèmes…).

La gestion même de l’incident a provoqué un arrêt de la production et donc un certain nombre de voitures ne sortiront pas l’usine dans les délais prévus. Que faire ? Pressurer les employés pour sortir quand même à l’heure au risque d’une qualité moindre ? Prioriser les envois aux concessionnaires pour assurer les livraisons les plus importantes et tant pis pour les autres, qu’ils se débrouillent avec leurs clients ? Non, chez Toyota, on va toujours chercher à assurer ce juste-à-temps, ce qu’il faut, quand il faut et dans les bonnes quantités et toujours dans le respect des collaborateurs.

Dans le cas de notre incident exceptionnel, on va avoir recours à des heures supplémentaires qui seront annoncées après la fin de l’évaluation de l’incident, temps de travail qui peut aller de 15 min à 1 heure maximum. Selon notre guide, les employés n’ont pas l’air satisfaits mais pas pour la raison que l’on croit. Elle nous explique que pour favoriser le respect des délais, une prime importante est offerte tous les jours si la production est réalisée en temps et en heure, alors que les heures supplémentaires sont moins bien payées. Le travail en flux tiré mixé lissé du début à la fin fait que cela concerne l’intégralité des employés de l’usine puisque pour que cela fonctionne, ils doivent tous sans exception (logistique, ateliers, tests…) assurer ce juste-à-temps à toutes les étapes de fabrication.

Dans le cas d’un incident plus bref, on pourrait penser à augmenter le cadencement / la vitesse de chaîne pour atteindre un takt plus bas si cela si possible, uniquement si les employés sont formés aux gestes nécessaires. Il est d’ailleurs à noter que ces gains de performance ne sont souvent devenus possibles que suite à de nombreux kaizen (amélioration continue) effectués régulièrement par l’ensemble du personnel, des opérateurs aux ingénieurs.

Au final, la gestion de l’andon dans un cadre de juste-à-temps est donc réalisée avec souplesse et maîtrise, n’induisant aucun stress chez les employés parfaitement formés, dans la stricte mise en pratique de la base du Toyota Production System : respect des collaborateurs, satisfaction totale des clients.

 

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